Images et Poésie

Textes

« Ma Transcendance du Temps »

(Textes essais, images et photos de Mami)

Porcelaine Féerique

Il existe une beauté pure sur une toile blanche.
En prenant mes pinceaux, je me demande parfois si l’acte de peindre ne correspondrait pas à l’acte de souiller cette beauté. « La beauté naturelle, et la beauté de création. Dans la fatalité de ces deux thèmes opposés, l’humanité nous a laissé un patrimoine artistique dépassant l’éternité… ».
Cette idée me traversa l’esprit pendant que je contemplais le travail des artisans d’une manufacture de porcelaine…
Les beaux décors dorés brillant sur la porcelaine…Ces services de vaisselle en porcelaine de Limoges, qui ont tant passionné monarchie et noblesse de France, doivent être plutôt appelés œuvres d’art. La porcelaine sortant du four, ressemble à la toile toute blanche avant l’usage du peintre.
Et c’est sur cette surface lisse, fine et translucide, que les pinceaux habiles des artisans se mettent à danser : rouge, bleu, vert, et or, les motifs dessinés sont résolument de toute grâce et finesse.
En France, la vaisselle figure traditionnellement dans la liste de mariage. Cette vaisselle est souvent utilisée pour recevoir les hôtes, quelquefois agréablement surpris par la tendre attention de la maîtresse de maison : la nappe et les fleurs pour décorer le vase, choisies en fonction de la couleur des assiettes et tasses utlisées…
Quelques jours plus tard, en visitant le musée des Arts-Décoratifs de Paris, j’y ai appris que le célèbre peintre Renoir avait été dans ses premiers temps, artisan décorateur dans une manufacture de porcelaine. C’est souvent par hasard que l’on a l’heureuse occasion de rencontrer ou d’apprendre des choses inattendues.
A la fin de la visite, j’achetai un carnet de bal en porcelaine de Limoges, trouvé dans la boutique du musée. Autrefois, les gens de la haute société y rangeaient leurs petits feuillets des prochaines danses accordées à leurs doux partenaires .
En sortant du musée, il faisait déjà nuit sous le ciel de Paris, et la lumière incertaine de la ville se confondait avec la lumière des bals de jadis…

Le Moulin de la Galette

par Mami | Ecoutez l'artiste grâce à cet enregistrement.

Le blanc Sacré-Cœur se teintait de la couleur rouge du crépuscule. Le vent traversant les arrières-rues de Montmartre était glacial.

L’hiver à Paris.

Les passants se pressaient, les touristes se faisaient rares, et Paris avait retrouvé sa calme saison.

Ce jour-là, j’attendais un ami dans un salon de thé. Retrouvailles après plusieurs années… C’était aussi un ami de mon père, qui habitait Montmartre bien avant ma naissance. De son vivant, mon père le considérait comme l’un des artistes français les plus représentatifs, et aimait beaucoup ses paysages. Mon père peignait des personnages, lui des paysages…Depuis mon jeune âge, j’avais ainsi eu, deux professeurs de peinture. C’était lui, qui après le décès de mon père, m’avait encouragé à continuer ma voie d’artiste peintre…

Dans le paysage du crépuscule, se détachait la silhouette du Moulin. Et de la fenêtre de son atelier, on pouvait également  voir le fameux Moulin . Il m’avait appris à connaître le bon vieux temps de Paris, les charmes de Montmartre, et l’esprit Français…

« Bonsoir, ma jolie Reine. »

En levant les yeux, j’aperçus le sourire familier aux cheveux blancs.

« As-tu déjà commandé de la galette ? », continua-t-il de dire, en abréviant les salutations.

On était le 6 janvier, jour de l’Epiphanie. Jour de la Galette. Lorsque j’étais écolière, j’avais tiré la Reine lors d’une fête donnée au Nouvel An dans son atelier.

En cette saison, beaucoup de salons de thé proposaient leurs galettes. Bientôt, on nous apporta notre seconde tasse de thé, avec la part de galette pour chacun. En découpant nos morceaux, nous y trouvâmes tous deux, une jolie petite fève en porcelaine.

« Retrouvailles du Roi et de la Reine !… »

Et il m’embrassa sur la joue en souriant.

Le Coq qui traversa la Mer

Ce jour-là, je me tenais sur une plage de Normandie.
L’odeur nostalgique de la mer, le vent maritime qui souffle, me rappellent un lointain souvenir…
Enfant, avec mes parents, nous passions un mois de vacances dans une maisonnette louée au bord de la mer.
Hors du vacarme de Paris, ici s’écoulait lentement le temps.
De la colline éloignée du village, on apercevait la mer resplendissant dans son bleu foncé. Sur la pente qui conduit jusqu’à la colline, se tenait une église au toit rouge. Au sommet, il y avait une vieille girouette qui grinçait sèchement avec le vent. Mon père et moi adorions le paysage vu de cette colline, tellement que nous y venions tous les jours. Chaque fois que je passais devant l’église, en regardant sur le toit, le coq restait toujours tourné vers la mer. Pourquoi regarde-t-il toujours la mer ? Je trouvais cela très curieux…
De la fenêtre de notre cottage, on voyait au loin le toit de l’église. Le coq , devenu silhouette avec le crépuscule, se tenait bien droit, comme si d’un moment à l’autre il allait s’envoler. La veille du retour à Paris, une tempête hors de saison, traversa le village. Une pluie violente battait à la fenêtre, le vent hurlait, et la mer semblait lâcher un cri déchirant. Même dans mon lit, je n’avais pas pu m’endormir tout de suite, non pas à cause de la peur, mais parceque j’étais préoccupée par le coq.
Le lendemain, il faisait beau comme s’il ne s’était rien passé, la mer avait retrouvé l’éclat de son bleu foncé.
En rangeant les bagages dans la voiture, soudain je levai les yeux vers le toit de l’église…Le coq n’était plus là.
« Où est-il passé ? »
« Il a sans doute traversé la mer », m’avait répondu en souriant, le propriétaire de la maisonnette…
Le paysage vu de la colline et l’église étaient restés intacts.
Le coq a sans aucun doute pu traverser la mer, sain et sauf.

Juste après le terrible incendie de la cathédrale Notre-Dame de Paris, qui a perdu sa grande Flèche construite par Viollet Le Duc, j’ai pu apprendre aux informations, que le  précieux Coq du sommet avait été retrouvé, et pourra être sauvé. Il aurait  été transporté dans un atelier de restauration…

Les Abeilles de l’Opéra

Rien de meilleur pour apaiser la fatigue de la veille, qu’une tasse de thé accompagnée d’une cuillerée de miel, lorsque la journée commence tôt le matin. L’une de mes habitudes, était de prendre un thé Earl Grey…
Un jour, j’avais rendez-vous dans un café tout proche de l’Opéra. Je commandais comme d’habitude mon Earl Grey avec du miel. Le garçon du café aux cheveux blancs voltigeait d’une table à l’autre…
Comme pour annoncer déjà la fin de l’automne, le ciel de Paris se clarifiait. Un air frais agréable. A côté, seraient-ce des touristes qui vont voir un spectacle à l’Opéra ? Un guide à la main, une femme bredouillait une explication en anglais…Anglais, Allemand, Italien,…Le temps s’écoulait si vite, rien qu’à observer toutes ces différentes civilisations…
Peu après, on m’apporta sur la table, mon thé avec le miel contenu dans un ravissant flacon. Je remplis ma seconde tasse…Mon regard se porte sur ces quelques mots : « Miel de l’Opéra ». Il semble bien que des abeilles habitent l’Opéra. S’endorment-elles
chaque soir en écoutant l’Opéra ?
Le rêve doux des abeilles…
La couleur transparente du thé à la bergamote se teintait d’un rouge encore plus intense, sous les rayons du soleil couchant.

Un hiver au Rouge d’Italie

 

« Tes cheveux noirs sont ravissants ».

C’était Jean, mon camarade de classe, qui courait à petites enjambées, après m’avoir adressé ces paroles en me croisant dans le couloir. Son blouson de cuir et son écharpe rouge d’Italie étaient sa marque caractéristique. Le rouge allait bien avec ses cheveux dorés attachés derrière. En sortant des locaux, des flocons blancs commençaient à voltiger du ciel bleu gris.

La première neige de cet hiver.

Au journal du matin, on avait annoncé un temps de neige sur Paris. Sur le chemin du retour, je descendis du métro, une station avant, pour me promener seule dans la rue de Passy. Les magasins en bordure de la rue étaient déjà décorés de rubans rouges et verts pour Noël. Dans une des boutiques, étaient brillamment exposés des tricots de multiples couleurs, et vue de loin, on aurait presque pensé un fleuriste. Les passants se penchaient sur les vitrines où étaient disposées les marchandises dans leurs jolis emballages.

Pour sa famille bien-aimée, ses amis…

Le lendemain, Paris était légèrement enveloppée par la neige. Après les cours, Jean me proposa d’aller au café près du lycée, où nous passâmes l’après-midi. Son grand-père était originaire d’Italie du nord. Il avait été dans le passé, champion de ski. Et le rouge vif était la couleur emblématique de son grand-père. Son écharpe rouge habituelle, éblouissait sur la ville blanche…

A Noël, il m’offrit une écharpe en cachemire toute blanche.

« Le blanc va si bien avec tes cheveux noirs … ».

Une histoire de rouge et de blanc, peinte sur une toile de neige.

 

Bleu de Paris

par Mami | Ecoutez l'artiste grâce à cet enregistrement.

La vue de Paris du Pont des Arts est d’une beauté extraordinaire… Le spectacle de la tombée du jour d’un début d’été, laissant un bleu profond, fait oublier le temps qui passe. La tour Eiffel s’embrumant au loin. Le palais du Louvre éclairé.  Derrière moi, l’île de la Cité pareille à un magnifique bateau de croisière. La seine coule doucement, les bateaux-mouches passent sous les ponts, en illuminant la surface de l’eau et les arbres…

C’était à la fin du trimestre pendant le cours de peinture, que j’avais parlé avec elle pour la première fois. Personnages, paysages, abstrait….Les étudiants se critiquaient réciproquement. Dans ces cas-là, même entre amis, chacun pouvait devenir rival de l’autre au regard exigeant. « Le paysage du soir que tu viens de peindre, c’est Paris même! », m’avait-elle chuchoté en souriant, assise à côté de moi. Une semaine plus tard, mon paysage fût selectionné comme elle me l’avait prédit. Un bleu profond et transparent, le bleu du ciel de Paris à la tombée du soir, celui que j’avais rencontré chez un marchand de couleurs situé sur les quais de la Seine. « La mélodie bleue de Satie accompagnerait si bien ce tableau. », avait-elle prononcé.

Tout cela comme si c’était hier…. « Bleu de Paris ». Depuis le pont, je regarde vers le ciel. Sur un ciel bleu foncé, glissent de blancs nuages. Oui, si belle, si belle, ne trouvant d’autre mot que si belle, est cette ville, Paris, qui m’enveloppe avec tendresse…

 

Mer de Lumières

« Mesdames et Messieurs, bienvenue et bon retour  à Paris. »
La voix du capitaine d’équipage, annonçant l’arrivée à l’aéroport de Roissy Charles de Gaulle, résonne à bord de l’appareil. L’heure à Paris, la température, le taux d’humidité…Après l’annonce habituelle, ce sont ces dernières paroles que j’aime…
Bientôt l’avion commence à baisser son altitude. Du hublot, on peut voir scintiller les lumières de Paris, tout comme une voie lactée se détachant de l’obscurité. S’en rapprochant de plus en plus, touchant la mer de lumières…
Un moment de silence.
Le vrombissement de l’avion s’étant un peu calmé, et avec le brouhaha des passagers, je reviens à la réalité.
La France est pour moi mon pays natal.
Depuis ma plus tendre enfance, chaque année je passais mes grandes vacances au Japon, pays de mes parents. Malgré mon sang japonais, le Japon restait pour moi un pays à découvrir. Lorsque mes parents étaient occupés, on me laissait chez ma grand-mère, et je liais d’amitié avec les enfants du voisinage.
Feux d’artifices, fêtes, baignades…
Une scène d’été typiquement japonaise s’étalait sous mes yeux. A l’approche de la fin août, chacun ayant des devoirs
à terminer pour le nouveau trimestre, on ne se voyait presque plus. Lorsque je quittais le Japon, j’éprouvais toujours, à la fois une certaine tristesse, et en même temps une joie de retourner en France.
Souvenir d’une sensation partagée…
Avec ses escales à Anchorage ou à Moscou, c’était tout à fait le voyage aérien en ce temps-là…
Au vol de nuit, je me languissais de voir l’illumination de Paris.
Dans la Mer de Lumières…
Est-ce peut-être un retour vers ma propre identité…

Neige Bleue de Mégève

par Mami | Ecoutez l'artiste grâce à cet enregistrement.

Au soleil couchant, quand la nuit tombait silencieusement, Megève atteignait l’Instant de sa plus grande beauté. Les montagnes, les arbres, et les toits, tout se teintait en bleu de cobalt, et au fur et à mesure que le temps passait, cette couleur créait un paysage fantastique et profond.
C’était en classe de neige, le premier hiver de mon entrée au petit lycée, que je m’étais rendue dans ce village situé au pied des Alpes. En prenant l’autocar de Paris le soir, j’arrivais enfin à Megève, le lendemain matin lorsque le ciel commençait à blanchir. En descendant de l’autocar, mon souffle blanc était glacé, et emportait avec lui le sommeil. Devant mes yeux s’étalaient les Alpes en un monde argenté magnifique, qui me bouleversa, et m’enchanta. La veille de mon retour à Paris, j’allais à la patinoire de la place du village, en compagnie de Claudia avec qui je m’étais liée d’amitié.
« Quand je serai grande, j’aurai une maison secondaire ici. »
Elle souriait en glissant sur la glace.
« Son rêve se réalisera, c’est sûr. »
J’en eu la certitude en regardant dans ses yeux bleus…
Depuis, les années se sont écoulées, et je me retrouvais de nouveau à Megève en hiver.
Elle s’était mariée et habitait Lyon.
C’était avec son mari, architecte, qu’elle avait tracé le plan du chalet à la jolie cheminée.
Je les écoutais, et le soleil se couchait dans l’ombre des montagnes.
Flammes orangées, nuit bleue….
Son sourire rempli de bonheur était resté le même que celui de la jeune adolescente qu’elle avait été autrefois.
Une neige bleue scintillant au regard bleu…

Un Amour au Parfum de Muguet

Au temps où j’étais lycéenne, mon ami m’emmenait pour la première fois en pique-nique dans la forêt de Meudon.

De Paris, sur l’autoroute communiquant avec Chartres, en roulant une quinzaine de minutes en voiture, s’étalait alors un paysage tout entier de verdure.

Meudon, une ville de forêt…

Après Pâques, comme pour montrer leur joie d’être libérés d’un long hiver, les arbres se mettaient à bourgeonner tous ensemble, les fleurs s’épanouissaient de part et d’autre. Les rayons du soleil brillaient encore plus fort, les gens sortaient de chez eux unanimement…

Mon ami de trois ans plus âgé que moi, était étudiant en biologie à l’université. Depuis notre enfance, nos maisons étant proches, nous nous fréquentions en famille. Etant fille unique, il était pour moi comme un frère aîné. Ce matin-là, je m’étais levée tôt pour préparer le repas de notre pique-nique. Du poulet froid en gelée, des asperges, et des courgettes à la tomate. En attendant l’ouverture des magasins, j’achetais une belle baguette bien croustillante. Puis du fromage, sans oublier le vin…

Sous le ciel bleu, sa 2 CV décapotable roulait sur l’autoroute vers Meudon en faisant teuf-teuf. Un vent frais égaillait la conversation : à propos de nos amis, des études, des nouveaux tubes de nos chanteurs préférés…Après avoir visité les œuvres de Rodin à la Villa des Brillants, nous explorâmes la forêt, à travers les chênes, les hêtres et bouleaux, où continuaient de petits chemins pavés. Nous déployâmes la nappe au bord de l’étang, et nous dégustâmes avec délice notre déjeuner. En levant les yeux, un nuage tout blanc dans le ciel bleu. Le temps s’écoulait doucement…

« Je souhaite que tu sois heureuse ». Il posa dans mes cheveux quelques brins de muguet cueillis dans les bois. Et m’embauma délicatement,  le parfum du muguet…

Le Mistral

par Mami | Ecoutez l'artiste grâce à cet enregistrement.

La coque toute blanche du bateau se dirigeait vers le large, en laissant un sillage. Le nom de baptême du voilier était « Le Mistral ».

Le soleil se rapprochait de l’horizon au lointain, et la crête des vagues folâtrait avec la lumière…

Cet été -là, elle se trouvait à Cannes. Un hôtel au bord de la mer. C’était par pur hasard qu’elle avait lié connaissance avec lui.

« Tu étais sur le bateau hier, n’est-ce pas ? ». Dans l’après-midi, une voix inconnue l’interpella, alors qu’elle était installée sur une chaise longue au bord de la piscine. Elle se retourna. Il se tenait là, debout, en chemisier bleu et tennis blancs. « Tu séjournes ici ? ». Souriant, il continua de lui raconter qu’il l’avait aperçue à la soirée sur le voilier de son ami.

Une brève présentation. Photographe free-lance, voyageant tout autour de la terre, c’était pour lui quelques jours de vacances. Le mois prochain, il partait pour Tahiti prendre des photos de posters.

A compter de ce jour, elle passait avec lui une merveilleuse semaine de vacances sur son voilier : croisière, repas à deux… « Je ne perds sur personne en ce qui concerne la photo et la voile, tu sais. ». Lorsqu’il était encore étudiant, il avait été plusieurs fois champion skipper à de nombreuses compétitions.

« La Mer est mon Amour éternel… », murmurait-il. La méditerranée au seuil du crépuscule, était resplendissante…

La veille de son retour à Paris, elle lui souhaita bon voyage, du balcon de son hôtel. Le bateau, après quelque moment, hissait sa grande voile en plein vent. Puis une douce accélération, avec un vent de terre sec s’éloignant vers la mer.

La rougeur du coucher de soleil s’amplifiait. Et se fit entendre le tintement des glaçons dans son verre…

A l’ombre du Cerisier

par Mami | Ecoutez l'artiste grâce à cet enregistrement.

Il y a un grand Cerisier dans notre jardin.
Le mois de mai au feuillage verdoyant, à l’ombre du Cerisier.
Le tremblement des feuilles sous la brise est une douce étreinte…
Bientôt, les petits fruits teintés de rouge, annonceront l’arrivée de l’été.
Parfum sucré se répandant dans toute la bouche.
 « J’aimerai toujours le Temps des cerises… »
Le feuillage bruissant au vent est la mélodie jouée par les cerises.
Cette année encore, le Cerisier chantant au vent, portera ses fruits plein les branches…

Direction Soleil

par Mami | Ecoutez l'artiste grâce à cet enregistrement.

Les tuiles orangées des toits, et les champs de blé vert. Au milieu, des cyprès alignés les uns à côté des autres, comme des apostrophes. Ensuite apparaissait le tapis de tournesols, continuant jusqu’au pied des collines… Je dépassais Lyon, dans l’après-midi. L’autoroute A7 entrait désormais en Provence. J’arrêtais ma voiture dans le parc de repos, pour prendre un déjeuner tardif à la cafétéria. Partie de Paris tôt le matin, j’avais roulé jusqu’ici sans m’arrêter. Un café noir brûlant apaisait fatigue et émotion. Je sortis de ma pochette la photo de mon ami. Son sourire malicieux n’avait pas changé…C’était à l’approche du printemps que j’avais reçu une lettre de mon ancien camarade d’école. Dans sa lettre, il me faisait savoir qu’il étudiait les arts décoratifs à Rome. Peu après, nous échangions quelques appels.

« Ne veux-tu pas qu’on se retrouve à Arles ? Parceque je retourne à Paris aux vacances d’été… » « A Arles ? ». A mon hésitation, il continua son explication: « Toi tu roules de Paris vers le Sud, et moi je roule vers le Nord. En roulant sur l’autoroute, on se retrouvera probablement aux environs d’Arles… »

J’acquiesçai à sa proposition un peu inattendue. Ce même jour, à la même heure, nous partîmes tous les deux chacun de notre côté, de Rome et de Paris, en direction de la ville d’Arles…J’arrivai à l’auberge des environs comme prévu.Le jour commençait à tomber, intensifiant l’éclat du parterre aux tournesols dorés. Au même moment, sa voiture arriva, en montant la pente. Il m’aperçut, et me salua en faisant de grands signes. Dans la lumière éblouissante, les fleurs de tournesol se balançaient au vent…

Juste un petit apéritif

C’était par hasard que je fis connaissance avec Michèle. Cet automne-là, je commençais à aller aux beaux-arts, et au chemin du retour, je rejoignais mes amis dans un café de Saint-Germain-des Prés. Sous le frou-frou des feuilles mortes dansant sur le pavé, les gens pressaient leurs pas pour rentrer chez eux. Le vent froid annonçait déjà la venue de l’hiver. Du trottoir d’en face, se faisait entendre l’appel des marchands de marrons : « Marrons chauds ! » Dans le commencement du soir, se confondaient les lumières des réverbères et des voitures…

A une table voisine, une jeune femme lisait assidûment un livre de poche. Au tournant d’une page, j’aperçu le titre : « Le vieil homme et la mer » d’Ernest Hemingway. Elle dirigea sa main vers son verre à moitié vide. Un beau kir d’un rouge transparent. Nos yeux se croisèrent. « Juste un petit apéritif », dit-elle en souriant doucement. C’était ainsi, après plusieurs visites dans ce café, que nous commençâmes à bavarder ensemble. A propos de nous-même et de notre famille, de nos goûts sur l’art et la littérature. Même après s’être invitées réciproquement à nos domiciles, nous continuions souvent à nous donner rendez-vous au café. C’était toujours un kir qu’elle commandait. Sa façon de prendre son verre, l’expression de son visage, avaient beaucoup de charme.

Les saisons passèrent, et l’année de ses fins d’études à l’université, elle se maria, et déménagea dans une ville sur la Côte d’Azur. Plus tard, je reçu d’elle une lettre. Elle disait qu’elle vivait heureuse, et comportait une photo.

Sur celle-ci, elle souriait un verre à la main, avec un soleil couchant à l’arrière-plan. Derrière la photo, avaient été rajoutés de sa belle écriture, ces quelques mots :

« Cocktail au Soleil couchant ».

 

Marne Dorée

par Mami | Ecoutez l'artiste grâce à cet enregistrement.

De notre maison située sur les hauteurs, on a une vue panoramique au-delà du bois de Vincennes. Quand vient le soir, les lumières de la ville se confondent au ciel de la nuit. Juste en dessous, la Marne coule paisiblement. Puis comme un grand ruisseau, ira rencontrer la Seine, pour se mêler dans la Manche.En automne, elle se teinte de couleur dorée… Les feuilles tombées des marronniers et platanes des bords de rives, volent au vent, et colorent le dessus du fleuve de couleurs d’automne. En regardant par le pont, on croirait que le courant doré vient en continuant de très loin à l’horizon…

Si l’on parle de Paris, tout le monde citerait la Seine. Mais pour moi, c’est la Marne en automne qui devient dorée, que j’adore. Les feuilles tombées transformées en petits navires de feuilles mortes, se lancent dans la mer.

Quand j’étais enfant, cette Marne qui m’avait fait rêver d’un monde lointain, même après que le temps ait passé, coule aujourd’hui lentement, comme autrefois. Sur les berges, plusieurs restaurants rappelant le charme des guinguettes d’antan, ayant construit des terrasses donnant sur la rivière, présentent chacun leurs spécialités.

L’un de mes préférés est l’Auberge de l’Ecu de France. Restaurant nostalgique, où nous nous retrouvions en famille ou avec des amis… C’est après une longue absence que je visite ce restaurant, avec ses élégantes baies vitrées, et sa terrasse donnant sur l’eau, restée intacte. Je m’assois à une table, et je commande la même crème brûlée que j’avais l’habitude de choisir au dessert, avec un thé Earl Grey.

« Bon appétit », me souhaite le maître d’hôtel en souriant. Je prends mon thé, et goûte avec délice ma crème brûlée. 

Une feuille morte atterrit sur ma table en voltigeant. Juste à ce moment, la Marne baignant dans la lumière du soleil, scintille en une couleur dorée…

 

Le week-end à la campagne

Au matin, les rayons du soleil, tout éblouissants, pénètrent par la terrasse…

Le gazouillement des oiseaux, le meuglement des vaches, me libèrent des bruits de Paris de la veille. Chose curieuse, en entendant l’appel du réveil de ma mère, je me lève en bondissant de joie, alors que d’habitude, j’aurais préféré rester encore au lit.

La journée en Normandie commençait toujours ainsi…

Comme chaque week-end, nous allions profiter de la vie à la campagne, souvent en compagnie d’une famille d’amis…

Les enfants devaient aller à la ferme proche de la maison, pour acheter du lait et des œufs frais. Les pères de famille faisaient une promenade, ou bien étaient absorbés dans les soins du potager et des pommiers du jardin.

Tous réunis, le petit déjeuner tardif commençait aussitôt : des brioches toutes chaudes, du café au lait frais. Et aussi l’omelette, qui était ma spécialité, et dont j’étais fière de ma recette. Mon père, qui d’habitude ne cuisinait pas souvent, était plein d’entrain. Il s’était même muni de son tablier préféré.

Nous passions l’après-midi tranquillement, chacun à sa guise, en lecture, jeux de cartes…

Mon père et moi, allions toujours ensemble, nous promener et dessiner, au village tout proche. Les villageois, avec qui nous avions sympathisés, nous demandaient : « Avez-vous terminé les soins de vos pommiers ? ».

L’automne, où les pommiers portaient leurs fruits en abondance…

Devant les confitures et tartes aux pommes faites maison, mon père était fier des produits réussis grâce à son travail soigné de jardinier.

L’odeur du foin, la cueillette des pommes…

Ces souvenirs de week-ends passés en Normandie, que je n’oublierai pas… 

Une chambre aux couleurs de la mer

L’année de mon entrée au lycée, nous déménageâmes de notre maison de banlieue dans un appartement ancien à Paris.

Cela faisait toujours de la peine de devoir quitter les amis du voisinage, mais j’avais tout de même une petite consolation, le plaisir de pouvoir changer le décor de ma nouvelle chambre. Cette fois, nous avions décidé que chacun décorerait selon son goût et ses idées…J’eu donc l’occasion de m’occuper entièrement de ma chambre et de sa salle de bains attenante.

« J’aimerai que ma chambre répande la fraîcheur de la mer… ».

J’adorais le bleu pastel. La couleur de la mer brumeuse de Deauville du matin, où j’étais allée un jour avec mon père… J’avais choisi un papier peint à petits motifs fleuris, style Liberty, aux couleurs de même ton, ainsi qu’un abat-jour assorti. Et comme un nuage flottant dans le ciel, un couvre-lit d’un blanc crémeux. Mon père me fit cadeau de son fauteuil à bascule préféré, acheté autrefois aux puces.

Quelques années plus tard, il avait quitté ce monde, mais le fauteuil à bascule disposé au coin de la pièce, était resté pour moi, comme la présence de mon père.

Je m’assois dans le fauteuil, et ferme les yeux…

Alors m’enveloppe doucement, la mémoire lointaine de Deauville.

Autobus N°32

par Mami | Ecoutez l'artiste grâce à cet enregistrement.

Un après-midi ensoleillé à Paris.

En sortant de la librairie, j’aperçois au loin la tour Eiffel.

La lumière du soleil, et le parfum subtil des marronniers…

Un vent légèrement froid, me faisait agréablement sentir le changement des saisons.

Je marchais vers le Trocadéro en prenant mon temps.

Cette rue nostalgique, où je passais tous les jours, lorsque j’étais lycéenne.

Les belles façades des immeubles, des femmes élégantes bavardant sur les terrasses des cafés, m’apparaissaient comme une scène en décor d’un film, inoubliable dans le cœur de l’adolescente de dix-sept ans que j’avais été…

Le salon de thé « Carette », Place du Trocadéro, est resté le même, toujours prisé des gens du quartier, mais aussi par les touristes.

En sortant du lycée, j’allais souvent avec une amie, y acheter notre goûter en pâtisserie. Mes gâteaux préférés étaient les éclairs, et les pains aux raisins. Puis, à l’arrêt du bus, nous nous quittions, « A demain ! ». Et je montais dans l’autobus n°32…

Je m’installe sur la terrasse devant la place, en posant sur la petite table, les deux livres que je venais d’acheter.

L’un était un livre d’art.

Et l’autre, un recueil des poèmes de Baudelaire, que j’avais autrefois étudié dans mes cours au lycée.

« Adieu, vive clarté de nos étés trop courts !…..». *

Sous mes yeux, passe un bus, me rappelant les anciens autobus en vert foncé de jadis…

A cet instant, souffla autour de moi, un vent aux couleurs de l’automne…

 

* Chant d’automne, Les fleurs du mal / Charles Baudelaire

 

La baguette au vent de la mer

 Café au lait et baguette toute chaude : un petit déjeuner tardif que je prenais tout près des douces flammes de la cheminée. Le vent sec soufflant du balcon, annonçait déjà la mi automne. De l’appartement, on pouvait voir au loin les bois dorés. Les feuillages baignant de rayons de soleil, pâles et transparents, semblaient scintiller comme la mer.

Je contemplais ce spectacle, et mon cœur se remplissait d’un frais parfum de vent de mer.

Antibes, ville de la Côte d’Azur, que j’avais visitée pendant les vacances. Toute proche du cap, cette ville aux remparts, d’aspect paisible. J’avais encore l’impression que c’était tout juste hier, mes promenades au hasard…

Le marché sur la grande avenue.

Le petit café au fond d’une ruelle.

Le musée à l’intérieur du vieux château.

Sur la route du bord de mer, continuant jusqu’au cap, se tenait une boulangerie à l’apparence vieillotte. Autour du magasin, tôt le matin jusqu’au soir, flottait une bonne odeur de pain cuit sortant du four. 

« Même les plus vieilles boulangeries traditionnelles de Paris ne font pas d’aussi bons pains, n’est-ce pas ? ».

Le patron de la boulangerie avec qui je m’étais familiarisé, était un joyeux personnage, d’origine italienne. Les longues et fines baguettes sortant du four, étaient le produit de sa fierté.

Le cap au crépuscule… La Méditerranée sous mes yeux, comme regrettant la fin d’une journée, se mettait à briller au fur et à mesure que le soleil, déclinant vers l’ouest, fonçait lentement sa couleur orangée.

Sur le rivage, je croquai un morceau de ma baguette… Avec le croustillant, se répandit une bonne odeur de pain cuit.

A ce moment, souffla un agréable vent de mer. Oui, une baguette au vent de la mer…

 

 

La Boum

 

La boum est un vague souvenir d’un premier amour d’adolescence.

Marianne reçoit au printemps de ses quinze ans, une invitation à une soirée. La soirée d’anniversaire d’une amie d’enfance. C’est dans leur grand appartement de l’avenue Montaigne, qu’aura lieu la soirée.

« Chère amie, …». Sa belle écriture sur son papier à lettre bleu, et à en-tête doré, témoigne de son goût raffiné.

Les lycéens, portant jeans et blousons au quotidien, font exception ce jour-là, pour soigner sa tenue de soirée.

« Je mettrais ma robe rose abricot et mes escarpins vernis », se dit-elle. En posant une touche de rose sur ses lèvres devant le miroir, elle imaginait la tenue splendide des autres invitées. Bientôt, la sonnerie de l’entrée se fait entendre dans le couloir. C’était Léo, son camarade de classe, venu la chercher. Lui aussi, aujourd’hui avait mis son smoking bleu nuit. « Ce costume vient de mon frère… », dit-il en souriant timidement. Il avait toujours été dans la même classe qu’elle depuis son entrée au lycée, mais sans savoir pourquoi à cet instant, son cœur semblait palpiter pour la première fois. Un moment de silence…

« Passez une bonne soirée ! », la douce voix de ma mère à la sortie, avait détendu les deux jeunes gens un peu gauches.

Pendant le trajet, elle achète pour offrir à son amie, des douceurs à la pâtisserie, et lui, deux albums de Billy Joel au drugstore du quartier.

« L’un des deux albums est pour toi… ».

Cet album, une des musiques préférées de Marianne même aujourd’hui, lui rappelle un souvenir lointain du timide sourire de Léo, habillé en smoking…